Le sens de la vis, BD de Jean-Yves Ferri et Manu Larcenet
Pour tout dire le style de dessins de Manu Larcenet n'est vraiment pas ma tasse thé car à force de lire des comics j'ai souvent du mal à apprécier autre chose ce qui est bien dommage . Sans les conseils avisés d'un couple d'amis, il est fort probable que je serais passé à côté du Combat ordinaire et du Retour à la terre qui font aujourd'hui partie de mon panthéon. Les textes mais également les dessins de ces deux séries m'ont tout à tour fait rire à gorge déployée ou plongé dans une réflexion durable sur les relations humaines.
Les mêmes amis viennent de me prêter le premier volume du sens de la vis. Cette fois Emmanuel Larcenet abandonne les cases, ces "petites maisons en bambou qui empêchent le vent harmonieux de souffler sur [la] page" et propose avec son complice Jean-Yves Ferri de découvrir la teneur des échanges entre Demi-lune et son maître spirituel en pleines pages.
Demi-lune, dessinateur qui arbore fièrement toge et casquette, se décide après une dernière bière sur le zinc d'aller exposer à la critique du philosophe oriental ses derniers croquis. En fait de critiques, le maître se cantonne le plus souvent entre deux citations du Dalai Lama à poser des questions tantôt naïves tantôt décalées à son disciple afin qu'il commente lui-même ses productions. Rien d'étonnant finalement quand on connaît le point de vue de Manu Larcenet sur la critique "La critique est un concept assez étrange : des gens disent à d'autres ce qu'ils ont lu et s'ils ont aimé ou pas. C'est leur boulot, je n'aimerais pas faire ça."
Les réponses de Demi-lune oscillent entre l'absurde et le récit de vie tandis que les rares véritables commentaires de son maître montrent tantôt son incompréhension tantôt son empathie. Le plus souvent les échanges sont drôlissimes car à force de se vouloir profonds ils virent au creux et hors de propos comme ce dialogue surréaliste autour du bassin des carpes ou de la recherche d'une vis nécessaire au montage du banc Ikéa sur lequel ils devisent et méditent.
Ce sens de la vis me rappelle cette photographie de Man Ray qui fait un clin d'oeil à Magritte où l'on doit se rapprocher pour s'apercevoir que la queue de la pomme est en fait une vis. Comprenne qui pourra ou voudra.
Pour lire une biographie de Manu Larcenet cliquez ici et là